" Il y a deux ou trois idées reçues sur le cas Virginie Despentes que Bye Bye Blondie contredit d’emblée, et avec fougue. Cette vieille rumeur médiatique, par exemple, qui en a fait l’écrivaine imprécatrice trash qui n’aime rien tant que gueuler contre le monde, les bourgeois, les hommes, les mauvais coucheurs – ce qui est sûrement un peu vrai, mais insuffisant. Ou cette autre idée, largement répandue depuis le scandale provoqué par son premier film-manifeste Baise-moi (réalisé avec l’ancienne porn-star Coralie Trinh Thi), selon laquelle le féminisme ne se formulerait chez elle qu’un flingue à la main, la censure en embuscade.
Bye Bye Blondie est certes encore le récit d’une guerre menée par un couple de femmes jouisseuses contre un ordre moral et sexuel oppresseur ; les hommes y sont encore figurés comme de beaux salauds parfaitement lâches ; le tableau de la société est toujours aussi binaire. Mais toutes ces données de base n’empêchent en rien le film d’être une vraie surprise venant de son auteur (du moins selon l’idée que l’on pouvait s’en faire) : une pure comédie romantique, drôle, hypersentimentale, parfois même un peu fleur bleue (...)
La grande réussite (...) tient précisément dans ce refus de la nostalgie (qui est le nihilisme des vieux), dans sa façon frondeuse de prolonger les amours et les rébellions adolescentes, qu’importe si ces personnages de quadras néopunks sont ridicules (et le couple Béart-Dalle l’est forcément un peu). Avec une candeur réjouissante, dans un style économe débarrassé des excès de Baise-moi, Virginie Despentes filme les retrouvailles électriques et pulsionnelles de ces femmes résistantes, pour qui le (no) futur s’envisage désormais à deux."